Tout d'abord, en ce temps là, les magasins de vente de composants électroniques étaient presque à tous les coins de rue (d'accord, j'exagère un peu), et très fréquentés (car, en ce temps là, les deux loisirs techniques dominants étaient l'électronique et la photographie).
Selon le cas, soit le propriétaire vous demandait la liste des composants que vous vouliez, et on le voyait ensuite se déplacer de bac en bac, le long de très grands rayonnages, prenant, ici et là, ce qui était sur votre liste.
Soit, le magasin était en libre service, et c'est vous qui passiez un bon moment à tourner dans les rayons pour y dénicher ce dont vous aviez besoin (avec le risque de vous laisser tenter par ce qui vous faisait envie).
Cette recherche se faisait avec un petit panier à la main (en plastique plein, sinon les composants seraient passés par les interstices). Une fois terminé, on passait à la caisse, bien sûr.
Ces magasins vendaient depuis la plus insignifiante petit résistance 1/4 de watt en carbone aggloméré (à ne jamais utiliser en BF), jusqu'aux matériels de laboratoire (oscilloscopes, wobulateurs, etc.). Outre les composants, l'on trouvait aussi la "quincaillerie" (vis et boulons, boutons de potentiomètres, coffret métallique et en plastique, mèches spéciales pour les circuits imprimés, perchlorure de fer, fers à souder, etc.).
On pouvait même y commander un transformateur spécifique, en donnant les informations nécessaires (tension maximale, courant maximal, rapport de transformation, prises intermédiaires...). Ensuite, le transformateur était réalisé par un bobineur (un métier, à l'époque) capable de vous faire des transformateurs classiques, des bobines d'arrêt, des bobinages en nid d'abeille, et j'en oublie en route.
Comme c'est évoqué dans d'autres messages, les revues d'initiation pullulaient chez les dépôts de presse, avec les grands classiques, comme "le Haut-Parleur" (dont au moins la moitié de la pagination était de la publicité), "Radio-Plans", etc.
Petite anecdote : les schémas publiés étaient souvent porteurs d'erreurs (soit de valeur de certains composants, soit de tracé des lignes de connection entre les composants). De ce fait, certaines firmes, quand elles recrutaient un technicien ou bien un ingénieur en électronique, lui présentaient l'un de ces schémas, à charge pour le candidat d'identifier les erreurs présentes. Selon sa capacité à repérer ces bourdes, il était embauché, ou pas.
A cette époque, les piles étaient vendues en vrac, comme les fruits et les légumes, mais mieux disposées, et rangées dans des cartons. Cette accessibilité directe permettait de les choisir (tout comme les fruits et les légumes) pour sélectionner les meilleures.
En effet, des piles récemment fabriquées peuvent présenter une grosse différence d'usure, préalable à toute utilisation, du fait de diverses raisons (dont la présence d'impuretés, etc.). Cela se traduit par une attaque déjà notable de la feuille de zinc qui constitue la couche extérieure de la pile (en dehors de son étui qui l'enclôt).
Si la pile était un modèle avec une enveloppe en plastique souple (et donc, pas en acier rigide), l'on pouvait déceler ce phénomène, au toucher, et il suffisait donc de prendre les exemplaires dont l'on sentait que la feuille de zinc était bien lisse, pour être sûr d'avoir choisi celles qui étaient les meilleures, dans un même lot, du même modèle, de la même marque.
Personnellement, j'achetais toujours des Leclanché à enveloppe en plastique noire, qui étaient le meilleur rapport-qualité prix. Bien que des modèles à technologie saline, utilisées (par jeu de six, au format R20), dans mon Schneider Atlas, avec des heures assez nombreuses d'écoute journalière, elles me duraient environ six mois.
Ces Leclanché étaient très bien conçues, pour la protection contre une fuite d'électrolyte, et même avec un exemplaire complètement à plat, et abandonné à son sort, pas la moindre coulure. Simplement, l'enveloppe en plastique se gonflait progressivement (dégazage interne ?), et la pile finissait par ressembler à une vache prête à vêler.
Comme évoqué par d'autres rédacteurs, en ce qui les concernait, mes envies de radio étaient également bien plus importantes que mes moyens, et les récepteurs de haut de gamme, je me contentais de les regarder, parfois pendant une heure, dans les divers magasins qui en avaient en vitrine ou bien sur rayonnage.
Dans les "grands magasins" (Monoprix, etc.) de l'époque, cette présence insistante, de ma part, finissait toujours par attirer l'attention de l'un des surveillants en civil qui se mêlaient aux acheteurs, afin de repérer les voleurs. A l'époque, pas de caméra de surveillance, ni d'étiquette anti-vol, la protection était basée sur l'humain, ce qui faisait du travail pour ces personnes.
Du coup, j'étais suivi et surveillé de près, au point que je finissais par connaître et donc repérer les diverses personnes affectées à cette surveillance dès qu'elles entamaient leur mouvement de rapprochement de ma personne.
Entre adolescents, nous parlions aussi de radio et d'électronique, car, comme déjà dit en début de ce texte, l'électronique était alors une activité de loisir assez fréquente, parmi les jeunes. Certains plus axés sur la radio, d'autres sur la HiFi, et d'autres encore sur les jeux de lumières de discothèque (les DIAc et les TRIAC se vendaient bien, en ce temps là), stroboscopie incluse. Mais les montages utilitaires (alarmes diverses...) avaient aussi leurs amateurs.
Toujours à cette époque, le matériel (composants comme équipements) étaient fabriqué avec une volonté de solidité et de durabilité. Par exemple, le Metrix 202B, que j'avais acheté (pour 750 francs d'alors), je l'ai toujours, et il est aussi fonctionnel et fiable qu'à ses débuts.
En ce temps là, la marque Métrix, c'était l'assurance de produits de très bonne qualité, et ce Métrix 202B était leur haut da gamme, pour les contrôleurs universels passifs (pas de FET ni de transistor, dans les circuits).
Pour les connaisseurs : classe 1,5 en courant continu (soit une précision de 1,5 % à pleine déviation, sur toutes les gammes), classe 3 en courant alternatif (3% de précision à pleine déviation). La gamme la plus sensible descendait à 25 micro-ampères à pleine déviation. Résistance interne de 40 Kohm par volt en continu, et de 1 Kohm par volt en alternatif. A l'intérieur, pratiquement que des résistances de précision ( à 1 % ou bien à 0,5 %).
Certains matériels audiovisuels n'étaient accessibles qu'aux gens vraiment fortunés (je pense notamment aux gros magnétophones à bande, en HiFi). Mais, la cassette Philips allait tout changer (rappelez-vous le premier magnétophone Philips, dit "magnéto-cassette", noir, avec sa grille de HP chromée, son rendu sonore moyen, et la commande unique : poussée vers le haut pour la lecture ou bien l'enregistrement (si le bouton rouge était enfoncé en même temps) ; poussée vers le bas pour l'arrêt ; poussée à droite pour le rembobinage, et poussée à gauche pour l'avance rapide (à moins que ce ne soit l'inverse).
Toujours au sujet des magnétophones, la solution des gens pas assez riche pour viser de l'Akaï, du Grundig, du Sony, c'était de se rabattre sur du Geloso (la marque italienne), ce que j'avais fait avec un Geloso 600 (à deux, ou peut-être trois, tubes électroniques) et plus tard, avec un Geloso 570 (à transistors). Avec des bande en ferrite standard, il ne fallait exiger ni une bande passante large (surtout à 4,75 cm par seconde), ni une dynamique fantastique.
Cette période des années 1960 aura peut-être été la plus riche en possibilités d'écoute, que ce soit en GO/PO/OC.
D'abord, la BLU n'était pas encore très répandue, pour les stations utilitaires, ce qui permettait leur écoute avec un simple récepteur en AM. Et pour ce qui est des stations internationales de radiodiffusion, avec la guerre froide qui battait son plein, l'on n'avait que l'embarras du choix, entre toutes les stations disponibles, dans tous les pays, émettant dans plein de langues différentes (dont le français).
En plus, ces diffuseurs se donnaient la peine de produire des émissions spécifiquement destinées à leurs auditoires distants, et non pas, comme de nos jours et pour les diffuseurs encore présents, en ondes courtes, en réutilisant, le plus souvent, des programmes domestiques (normalement destinés aux seuls auditeurs du pays d'origine de l'émission).
Toute station internationale se devait d'avoir une émission (au moins hebdomadaire) destinée tout particulièrement aux DXers (exemple l'emblématique : "La Suède appelle les DXeurs", ou bien, en langue anglaise : "DX corner", je crois).
Le courrier des auditeurs était un autre programme incontournble, tout comme celui des disques à la demande.
Pour revenir à la technique, à cette époque, la bande des 49 mètres était appelée l'Europa Band, car de nombreuses stations europénnes y étaient présentes (France, Allemagne, Autriche, etc.). D'ailleurs, les autoradios de cette époque, s'ils n'avaient encore pas tous la bande FM, étaient souvent équipés de cette bande des 49 mètres. En Allemagne elle servait notamment pour diffuser un programme du genre radioguidage, lors des WE.
La bande des 41 mètres et éventuellement celle des 31 mètres pouvaient aussi être parfois utilisées pour des émissions transcontinentales (pour une réception au niveau de toute l'Europe), de jour, surtout dans les périodes de maximum du cycle solaire, tandis que, de nuit, elles étaient plutôt destinées à des liaisons intercontinentales.
La nuit, quand la bande PO s'ouvrait au DX, nombreuses étaient les stations régionales (en PO), de certains pays, qui avaient un programme spécial à destination des auditeurs des pays limitrophes (et plus distants). Entre autres exemples, l'Allemagne, avec l'émetteur du Dutchlandfunk, notamment en français.
L'émetteur de Sud Radio, avec ses 900 Kw de puissance et son antenne directive orientée vers le nord, était audible, de nuit, jusque dans les pays scandinaves.
Autre programme très populaire, alors, le "Notturno italiano", diffusé par la RAI, sur les fréquences de 657 KHz (Naples), 900 KHz (Milan), 1,107 MHz (Rome). Ce programme semble être encore diffusé, mais, désormais, seulement en ondes courtes (sur 6,060 MHz), sur Internet, et via le satellite.
La France participait à cette logique, avec notamment l'émetteur en PO de Toulouse qui, une fois le programme français terminé (à 23H00 ou bien à minuit), émettait ensuite à destination de l'Espagne, bien entendu en espagnol.
Il est possible que l'émetteur de Lille, en PO, servait de la même façon, mais en langue allemande cette fois, et à la même époque. Un lecteur du Nord pourra me le confirmer (ou pas).
Et, n'oublions pas que les années 1960, c'est aussi le temps des "vraies" radio pirates, celles offshore, dont Radio Caroline (qui ne fut pas la première, mais qui reste la plus connue).
Cette richesse, et même cette abondance, de stations européennes en PO, dont celles avec un programme spécial pour les auditeurs des autres pays, avait justifié la fabrication (et la vente) de récepteurs optimisés pour cette utilisation. Ces récepteurs avaient la bande PO étalée en deux parties (PO1, PO2, MW1, MW1, par exemple), ou bien avec juste la partie haute de la bande PO qui était étalée, sur une ligne du cadran à part, ce qui facilitait le réglage sur une station, surtout dans cette partie haute de la bande PO (au dessus de 1 MHz), avec un simple système analogique (bouton rotatif et aiguille sur un cadran).
Parmi ces récepteurs particuliers il y avait l'Europa Boy 208 de Grundig, mais aussi le Normende Goldene 20 Charleston 49m, tous les deux avec la bande PO complète et usuelle, plus une "bande étalée" couvrant entre 1,3 MHz et 1,6 MHz, soit la partie supérieure de la bande PO. Ces deux mêmes récepteurs avaient également la bande étalée des 49 mètres, ce qui confirme leur optimisation voulue, pour l'écoute des émissions européennes, tant en GO, qu'en PO, qu'en bas de la bande des ondes courtes. PLus la FM, qui était également présente, sur ces deux modèles.
Une autre bande assez occupée, c'était la bande des 75 mètres, qui servait surtout à la couverture complète d'un pays et même de plusieurs (de nuit), avec un seul émetteur ondes courtes, dont la puissance pouvait être moyenne (une centaine de kilowatts), pourvu d'une antenne omnidirectionnelle, tout en assurant une bonne réception sur des centaines de kilomètres de rayon (de jour) et bien plus loin encore (de nuit). En plus, sur cette fréquence, le fading était moins marqué que sur les fréquences supérieures. La France et la Suisse, notamment, avaient un émetteur dans cette bande des 75 mètres.
Quant à la bande des 60 mètres, dite "bande tropicale", c'était l'exotisme garanti, avec plein de stations de tous les continents, mais essentiellement de l'Afrique et de l'Amérique du Sud (pour les auditeurs européens), une fois la nuit établie au niveau du pays d'émission et au niveau de celui de réception. Donc, en soirée et en début de nuit pour l'Afrique et en toute fin de nuit pour l'Amérique du Sud. La période hivernale, en Europe, offrant la meilleure opportunité d'écoute (nuit plus précoce et plus longue, moindre niveau du QRN, etc.).
Maintenant, cette bande est bien vide, la plupart des pays d'émission étant désormais passés en FM, quand ce n'est pas en steaming seul, pour certaines stations.
Toujours en ondes courtes basses, il y avait également des émetteurs "tropicaux", sur les bandes des 90 mètres et des 120 mètres, mais il fallait des antennes développées et des récepteurs sérieux, pour les capter.
Par contre, dans cette même zone de fréquences, l'on était aussi dans la "bande des chalutiers", elle même faisant partie de la bande dite "bande marine" (entre 1,8 MHz et environ 4 MHz). Vous vous doutez donc de ce que l'on pouvait y capter, de nuit si l'on n'était pas près des côtes, et aussi dans la journée si l'on était riverain de l'eau salée. Le Conquet Radio, Boulogne Radio, Marseille radio, pour en citer quelques unes, de ces stations.
Dans les ondes courtes de fréquence supérieures, c'était Saint Lys Radio qui prenait le relais, pour le service des navires en mer (avec ceux qui étaient situés à plus grande distance de la France).
Un autre service, disparu depuis bien longtemps, celui des émissions de "Le Bourget Radio", destinées aux pratiquants des sports aériens (planeur, aviation légère...), et constituées de bulletins météorologique spécialisés, qui étaient diffusés quotidiennement, en soirée (en tout cas, je n'arrivais à les capter qu'en soirée), depuis un émetteur travaillant en ondes courtes basses, et donc vers 3 MHz.
Même les émetteurs de radioffusion pour le grand public, alors, avaient plein de programmes courts et utilitaires, émis au bénéfice de certaines professions. Par exemple, les émetteurs régionaux de France Culture, en PO, avaient un bulletin météorologique (hebdomadaire ?) destiné aux agriculteurs, etc.
Maintenant, la seule émission spécialisée qui subsiste encore, c'est celle destiné aux navigateurs et plaisanciers, (le Bulletin Inter Service Mer), diffusé en GO, en soirée.
J'espère que cette courte évocation intéressera les plus jeunes de ce site, tout en rappelant bien des souvenirs aux moins jeunes (dont je fais partie) de ce site.
Cordialement,
Cascode